Alexane et Géraud de Maintenant ont pris depuis début septembre l’engagement de responsables de la maison Lazare de Marseille. Une aventure, au service des gens de la rue, qu’ils vivent avec leurs 4 enfants pour une durée de 3 ans.
La maison, située à 2 pas de la gare Saint Charles, permet une colocation entre des jeunes professionnels et des gens de la rue désireux d’en sortir.

La maison est constituée de 3 appartements (la colocation hommes, la colocation femmes et l’appartement de la famille responsable) autour d’espaces communs (salle commune et chapelle) et a pour vocation la rencontre et l’esprit de communauté.

Comment avez-vous eu l’envie, l’idée de cet engagement ?

Alexane : On connaissait Lazare depuis quelque temps par des amis qui avaient monté une maison à Toulouse. J’ai alors été séduite par le projet de l’association. Par ailleurs germait le désir d’une mission en famille, incluse le quotidien ordinaire et non pas comme une parenthèse dans la vie ; et c’est exactement ce que demande une maison Lazare.

Géraud : Nous avons par ailleurs clairement été poussés par la dynamique paroissiale. D’une part, les différents engagements que nous avons pris petit à petit au sein de la paroisse nous ont permis de prendre conscience que l’on pouvait s’engager avec les enfants, différemment ! D’autre part, les déjeuners solidaires ont été l’occasion d’apprendre à rencontrer des gens différents… comme à Lazare !

Alexane : Alors quand en début d’année j’ai vu l’appel de Soline et Simon du Crest pour la recherche de leurs successeurs, ça a fait tilt immédiatement.

Comment s’est fait votre discernement ?

Alexane : J’ai d’abord rencontré Soline pour discuter avec elle de la mission ; et j’ai été très vite été persuadée de ma place dans cette mission. J’ai senti que Géraud avait compris l’enjeu de cette rencontre pour moi.

Géraud : Pour aller plus loin on nous a ensuite invité à un « déjeuner de l’amitié » pour rencontrer la communauté et c’est là que j’ai était conquis à mon tour par l’esprit de la mission.

Alexane : Nous avons alors donné notre candidature. Le processus de sélection organisé par l’association Lazare est très bien fait, avec un questionnaire d’aide au discernement très poussé et plusieurs entretiens qui ont guidé notre cheminement.

Géraud : Et puis on nous a bien dit et redit la primauté de notre vie famille sur les obligations de la mission : « vous êtes choisis non pour réussir mais pour être fidèles ». Cette phrase continue de nous porter.

Trois mois après le début de votre mission, quelles sont vos premières impressions ?

Alexane : Cet engagement, c’est un temps plein et un investissement de chaque instant… mais en même temps, le fait de vivre sur place et d’être chez nous rend le service plus aisé. J’apprécie le caractère très concret de cette mission et cette vie en communauté.

Géraud : Les personnes de la rue dites « en galère » sont rapidement devenues de véritables compagnons. Je suis également très marqué par la recherche d’absolu qui anime les jeunes pros qui ont fait un choix de vie si engageant.

Quelles sont vos principales joies ?

Alexane : Les échanges quotidiens avec les jeunes pros ou avec les gens de la rue.

Géraud : Sur le plan personnel, on apprend sur nous-mêmes ; on déplace nos limites et on les dépasse. Cette expérience nous fait mûrir. Notre couple aussi s’en trouve renforcé. Chacun de nous a sa propre mission. Et chacun est dans l’admiration de voir chez l’autre des qualités connues se déployer ; ou des qualités inconnues jusqu’alors se révéler.

Alexane : Et pour ce qui est de la vie de famille, nous sommes heureux de voir nos enfants beaucoup plus ouverts à l’autre.

On les voit évoluer dans cet environnement, sans faire de distinction entre les personnes qu’ils rencontrent. Pour autant, nous restons vigilants à eux et à leurs besoins propres…

Il y a aussi des peines, sans doute ?

Géraud : Bien sûr. Nous pensons notamment à un colocataire qui a choisi de quitter la maison et retourner à la rue ; nous nous sentions impuissants face à sa décision.

Alexane : Il arrive aussi que certains des colocataires nous mettent en difficultés par leur comportement.

Qu’en est-il de votre foi ? La sentez-vous évoluer, changer, grandir ?

Alexane : Oui. Notre foi est évidemment questionnée, et tout le temps. Questionnée par les événements vécus en communauté, autant que par les témoignages de foi des jeunes pros, ou les récits des personnes en galère.

Géraud : Mais elle est aussi renforcée, notamment par deux habitudes qui rythment la vie de la communauté, et font pleinement partie du projet Lazare :
– l’office des laudes tous les matins avec les jeunes pros : un temps pour se tourner vers Dieu et lui confier ma famille et notre mission ;
– la table ouverte du vendredi soir ; c’est toujours un moment particulièrement intense où la communauté prend tout son sens ; on y voit des trésors, comme lorsque l’aidé devient aidant ; celui qui vient donner se voit aussi recevoir ; ces diners partagés ont lieu tous les vendredis soirs à 20h
– et tous les premiers dimanches du mois en hiver un goûter de l’amitié (15h30) et dès le printemps ça sera des déjeuners de l’amitié…

Propos recueillis par Béatrice et César.