Ordination de Rémi Bucquet
Des yeux clairs, un visage candide et de fines lunettes rondes. Rémi Bucquet, prêtre en formation à la paroisse, nous ouvre la porte de l’évêché d’Aix-en-Provence.
Depuis six ans, c’est dans cette bastide aux murs ocre qu’il vit et étudie. Si on a l’habitude de le voir en aube les dimanches, il porte le reste de la semaine, le vêtement noir et le col romain, “j’ai le droit comme c’est ma dernière année”, précise-t-il en marchant dans les couloirs un peu défraîchis.
Direction la salle commune où deux de ses camarades sont installés. Ils sont une vingtaine au total dans tout le sud-est de la France, à étudier comme lui pour devenir prêtre. Quand on demande à Rémi s’il est un spécimen rare, il acquiesce en souriant. Ses études religieuses l’ont “régalé sur le plan intellectuel”, assure-t-il. “Il y a un enracinement dans la vie de prière ; tout tourne autour de Dieu”. Au programme, entre autres, des cours d’histoire de l’Église, de psychologie, mais aussi de chant et de philosophie. De cette période, il retient aussi “les copains” qu’il s’est fait et les au revoir : “c’est une épreuve de voir les amis partir”, confie-t-il.
La quête de la vérité
Installé à deux pas du petit potager, dans un des bancs du jardin, sous les sapins, il revient sur son enfance en Seine-Saint-Denis. “Je suis né dans une famille très croyante (son père était diacre, ndlr), ma mère m’emmenait adorer au Sacré-Coeur tous les mois. Enfant, j’avais un amour de Jésus, j’avais confiance qu’il voulait mon bonheur et qu’il m’aimait”. Il avoue qu’à l’époque, déjà, il envisage une possible vie dans les ordres et attend “un appel éclatant”. L’intensité de la foi le suit pendant toute sa scolarité dans des établissements catholiques. Mais le doute s’installe lors du décès de son père. “Je me suis dit, si ça se trouve, il n’y a rien après la mort… Mon père est juste mort”. La foi revient dans sa vie au détour d’une retraite. “Une parole m’a touché, et plein de trucs sont arrivés dans ma vie, j’y ai vu une providence”. La question des signes revient souvent dans son discours, ils font office de balise sur le chemin de celui qui se définit comme “quelqu’un qui recherche la vérité”. Cette soif métaphysique ne l’empêche pas de garder contact avec son temps. Rémi voit ses amis laïcs tous les week-ends, fait du foot et un peu d’escalade. Il aime le jazz de Dave Brubeck et le rap. En ce moment, il écoute l’étoile sur le maillot de 13 organisé. Il a même composé un morceau, d’influence catholique, le pain : “partager plutôt qu’être solo/un pain qui se multiplie quand tu l’offres à d’autres/alors cesse de batailler et ramène-toi frérot /goûte à l’amour vrai et sois-en un apôtre”.
Un ministère de consolation
À la recherche de sa vocation, le jeune homme a suivi ce qu’il appelle “le parcours logique”, des études de math et l’École Polytechnique. Il se spécialise dans l’énergie et travaille neuf mois dans une entreprise marseillaise qui fabrique des panneaux solaires. “Mais j’avais toujours cette recherche d’absolu et il me manquait quelque chose”. Il se lance dans une année de propédeutique (temps de réflexion et de discernement qui précède l’entrée dans le séminaire). “Je voulais être sûr de ne pas être appelé”, reconnaît-il. Six ans plus tard, il s’apprête à répondre “Me voici”, à Monseigneur Aveline. “En fait, pour moi, l’appel était intérieur”, résume-t-il. Dans la paroisse de Notre-Dame-du-Mont, où il est affilié durant ces études, Rémi a été touché par “la bienveillance des paroissiens”, “on est invité dans les familles, on sent la reconnaissance des gens”. Lui, qui a renoncé à fonder sa propre famille, entend trouver une fécondité dans ces liens. Il reconnaît avoir rencontré des doutes sur sa route. “Plein de combats apparaissent, sur la chasteté, le rapport à l’autre, il faut aussi apprendre à vivre une certaine solitude”. Le 30 juin, il prendra trois engagements : le célibat, l’obéissance à l’évêque et l’observation des cinq prières quotidiennes. Après ? “J’aurais une mission en paroisse, je me laisse faire, je suis ouvert à tout, j’irai là où il faut”, assure-t-il. Il envisage de consacrer son ministère “à la consolation pour les gens blessés” et à “contribuer à l’accueil de tous dans l’Église« .
Meriem Bioud